Concepteurs : Philip Anderson, Françoise C. Rédacteur : Guillaume Rosquin Il est facile de se créer des obstacles fictifs, dites aussi « croyances limitantes », qui bloquent des reprises d'études. D'une part il faut réaliser que ceux qui passaient un baccalauréat en 1980 n'étaient que 20% des lycéens, et donc qu'ils ont actuellement environ 55 ans, ont fait leur carrière, et pour certains ont dirigé des entreprises en n'ayant qu'un CAP. D'autre part depuis cette époque les façons de travailler ont changé, des nouvelles normes sont apparues, des nouvelles technologies. Donc plus le travailleur est jeune, plus il a des chances d'avoir suivi des études plus longues que son manager. Ceci fait qu'il n'est plus trop possible de ne pas paraître atypique en reprenant un cycle d'études tardif si on ne veut pas être handicapé par une obsolescence de connaissances. Or cette formation continue est peu entrée dans la culture, et nous nous retrouvons avec une jeunesse peu expérimentée qui est académiquement du niveau de l'élite des seniors. Dans notre société qui est portée à l'aristocratie des Grandes Écoles dirigeant une population active moins éduquée, cela créé un paradoxe. La perception de la performance individuelle est altérée. Si dans « l'ancien système » on montait les échelons méthodiquement, aujourd'hui le diplôme propulse directement à un poste important, en particulier suite à une formation en alternance. Pourtant comme on le voit avec la rapide évolution de la techno-science, le diplôme est vite obsolète, tandis que ces anciens autodidactes se formaient en continu pour progresser. Mais un facteur sensible est aussi dans la croissance de l'entreprise : si elle stagne il n'y a pas d'ouverture de postes et les objectifs individuels ne concordent plus avec les possibilités offertes. Pourtant il est dans l'intérêt de l'entreprise qu'il y ait un enracinement de son personnel afin de s'assurer qu'il soit expérimenté, maîtrise son travail. Sa formation vient accroître la valeur ajoutée qu'il produit et par le renouvellement des méthodologies accroît ses performances. Il y a donc un besoin ambivalent de progresser avec la connaissance des théories, plutôt académiques, et celle de la pratique, du terrain, qui vérifie ces théories, les expérimente. En particulier lorsqu'on en vient à viser l'entreprenariat c'est par cette expertise qu'on assurera sa durabilité. Il y a donc au départ un besoin de connaître plusieurs entreprises, en début de carrière, jusqu'à atteindre un crédit de ses compétences avant d'opter pour une stabilité dans ses emplois. Cela induit une capacité d'auto-évaluation renseignée par la reconnaissance qu'on reçoit. On se comporte à chaque fois comme si l'entreprise où on est embauché est définitive, comme si le CDI va de soi. Puis c'est par les résultats obtenus dans l'accomplissement de son travail qu'on va parvenir à cette fidélisation au sein de l'organisation. C'est à partir de là qu'on pourra commencer de proposer des approches plus personnelles, à mettre en cause les méthodes de l'entreprise, ou alors envisager d'en trouver une autre plus propice pour s'exprimer. L'objectif étant autant l'endurance que la performance et le progrès.
Faut-il alors pour être performant avoir un esprit de compétiteur ? Doit-on comme un athlète viser les résultats, les succès, s'attacher à ses progrès, à son efficacité ? La société est-elle un gigantesque stade de Jeux Olympiques ? Il y a heureusement, plutôt dans les petites entreprises, un objectif plus modeste de l'emploi qui procure un revenu stable. Celles-ci se sont construites et ne visent qu'à durer sans trop de soucis, en s'appuyant sur leur réseau de partenaires fidèles. Cette activité régulière permet une sécurité de l'emploi. Car il faut bien disposer d'un champ de liberté pour être innovant et expérimenté, donc disposer de moyens que l'on vous fournit, et ne pas épuiser les travailleurs. C'est le plaisir d'être rentable qui doit fixer le barème de l'effort fourni.
Dès lors le développement de soi doit suivre une méthodologie, et répondre à des blocages dans son évolution par une analyse des causes, avant d'y répondre avec ingéniosité. D'où un rapport avec son manager qui doit permettre des degrés de liberté afin que l'on ne s'ennuie pas. Être durable implique que l'activité ait un sens, et être rentable permet sa rémunération. Or l'apparition des normes a réduit les moyens d'agilité, augmenté les conditions contrôlées, nuit à la souplesse, et changé la répartition des charges de travail. Comme elles accordent aux clients plus de droits et avantages, ceux-ci stimulent leur application. De tout cela nous voyons une métamorphose dans les modalités du travail depuis 40 ans. D'une époque relativement stable nous sommes arrivés dans une ère de dynamisme où l'angoisse d'être exploité qui pré-existait s'est transformé en une volonté de sur-performer, de rester dans la compétition frénétique qui se joue. Le business qui était assez simple est devenu sur une corde raide d'où régulièrement les entreprises chutent. La technologie a été révolutionnée par le développement des capacités digitales. Et les travailleurs n'y ont pas toujours été sensibles et ont pu se laisser dépasser. Durer est donc devenu synonyme d'une réadaptation darwinienne permanente. Au lieu de changements génétiques de notre ADN, ce sont nos capacités cognitives qui ont été revues, et nos objectifs de vie, le sens de notre existence.
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Septembre 2022
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