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Sottise et philosophie ?

2/11/2018

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La sottise s’entend comme un défaut d'intelligence, de jugement, de bon sens. Ça pourrait donc être un vice au sens d’Aristote car alors un excès d’intelligence, de jugement, de sens, pourrait être une forme d’hubris, de s’imaginer supérieur aux Dieux. Un juste milieu vertueux serait alors dans des intelligence, jugement, et sens commun qui soient moyens.

L’antonyme de la sottise est la sagesse. La philosophie, mot grec signifiant 'amour de la sagesse', serait donc une forme de haine de la sottise. Faut-il alors s’imaginer que tout de monde doive devenir philosophe, ou plutôt se répartir une proportion dans la population selon les capacités de chacun ? C’est un peu le même phénomène que le test « WAIS » dans lequel ceux qui ont un QI inférieur à 130 sont jaloux et envieux, et les autres malheureux d’être incompris. Pourquoi si on compare cela aux performances en course à pied, admet t’on facilement qu’être médaillé aux Jeux Olympiques est un exploit réservé à une élite ? Que si on le compare aux prouesses intellectuelles, peu de gens sont jaloux d’un bénéficiaire d’un Prix Nobel ? Faudrait-il donc créer un championnat de philosophie avec des prix pour apaiser les frustrations d’être resté sot ?

La base de ce problème me semble se situer selon deux aspects :
  • Si on laisse un sot diriger un pays plutôt qu’un sage, le risque de catastrophe paraît plus important, car il est moins capable de décider avec délibération. Cette perception qu’un sot serait mauvais et un sage meilleur doit avoir ses racines dans la démocratie athénienne où l’Assemblée (Ecclésia) aurait été composé de 20% des gens ayant le statut de citoyens. Avec une telle proportion de la population, cet « échantillon » qui se voulait totalement représentatif des volontés du peuple, devait être composé de toutes sortes de niveaux de sottise et de sagesse. En conséquence « naturelle » et « commerciale » apparaissent alors des « sophistes » qui sont des « experts en sagesse » et des rhétors experts en démagogie. C’est là où un rebelle à ce système qui se nomme Socrate va prôner une doctrine « d’amour de la sagesse » par opposition à un « amour du pouvoir ».
  • Cet « amour de la sagesse » va être plus tard (environ 600 ans) importé à Rome par Marc Aurèle avec ses différentes écoles (hérésies au sens étymologique : choix d’une doctrine) à une période où monte en puissance une nouvelle école philosophique, le christianisme. Cette philosophie relie sagesse et piété. Et quand 200-300 ans plus tard les peuples Germains (dont les Francs) envahissent et occupent par parties tout l’Empire Romain qui s’est converti officiellement au christianisme, le pouvoir devient propriété héréditaire de castes dites « nobles » tandis que la sagesse finit par se confiner dans les monastères. Adieu toute démocratie, le peuple est réduit à la sottise. Et quant à la sagesse elle devient utilisée pour satisfaire les nécessités de ceux qui s’en servent : prier Dieu.
Si on prend la traduction grecque de la sottise, c’est l’ανοησία (anoesia), l’absence (préfixe a-) de noésie (νόηση), qui est la compréhension, l’intellect, la cognition. Ces facultés paraissent nécessaires, indispensables, pour pouvoir interpréter convenablement les informations que l’on vous transmet et les expériences que vous vivez. En effet il faut savoir distinguer la science de la propagande, l’exact du mensonge, et cela requiert un temps d'apprentissage considérable, en plus d’une clairvoyance dans la confiance qu'on peut accorder à quelqu'un. Mais aussi réussir à se représenter ce que l’on vit (expériences) d’une manière scientifique, objective, alors que c’est une observation subjective, sensorielle. C’est alors seulement que l’on se rapproche de la sagesse : savoir prendre des décisions basée sur une science des conséquences qui soient bonnes. Être prudent.

Cela a une conséquence politique majeure en terme d’éducation des enfants, de la jeunesse. Eduquer, de l’italien e-ducere, est « conduire en dehors », c’est à dire préparer à affronter le passage à l’âge adulte, celui où on devient citoyen, où on va se mettre à agir avec un libre-arbitre plutôt que celui d’adultes qui sont responsables de vous.
L’enfant, innocent, n’imagine pas encore le mal qu’on peut lui faire. Une naïveté naturelle l’incline à avoir confiance dans les adultes. Ses éducateurs veulent en général son bien, mais pas toujours. Un bon parent souhaite que de sot il devienne sage, c’est légitime, mais va-t’il alors réellement lui inculquer de la sagesse, ou lui transmettre sa propre sottise ? Quel résultat obtiendrons-nous si un enfant doté d’un grand potentiel de sagesse est éduqué par plus sot que lui ? Le potentiel de gâchis est énorme ! Cependant il peut être réduit lorsque l’adulte reconnait qu’il a affaire à plus fort que lui, et s’en réjouit, y voit un bonheur plus qu’un malheur.
Photo
Illustration © Nicolas Rosquin 2018
Mais l’autre conséquence politique et philosophique porte sur le principe de l’autorité, le fait de réussir à se faire obéir, de disposer d’un pouvoir sur d’autres que soi.

Dans notre société moderne les gens s’étaient habitués à ce que certains d’entre eux obtiennent le privilège d’être nanti d’une autorité lorsque à force d’un travail d’apprentissage plus ou moins fastidieux, ils finissaient par obtenir l’honneur d’un emploi (managers ou enseignants) dans lequel ils étaient supérieurs à leur entourage. Ce statut de « maître » correspondait à la « maîtrise » d’un art ou d’une science, et ils escomptaient être respectés, obéis, en conséquence du rôle qu’ils tenaient.

L’essor d’Internet, l’intercommunication politique qu’il permet, rebat les cartes, surtout chez les jeunes, car une nouvelle Ecclésia est apparue, une assemblée populaire où tout le monde est automatiquement « élu » dès lors qu’il se connecte à un groupe social débattant d’un sujet ou d’un autre. Cela a particulièrement agacé le Président de la République lorsqu’un jour dans un « bain de foule » des jeunes l’ont joyeusement accueilli d’un « Salut Manu ! » La démo-cratie est de retour.

Certes l’APPEP a raison de réclamer un maintient de l’importance de l’enseignement de la philosophie (http://www.appep.net/lettre-au-president-de-la-republique/) mais de mon point de vue il faudrait en réviser certains concepts, en particulier l’objectif éducatif.
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    Guillaume

    International Business Controller. Chercheur en Sciences de Gestion. Ingénieur Systèmes d'Informations.

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